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Perception de la réalité :

comment le cerveau cherche-t-il à améliorer la réalité ?

     Le cerveau est un mécanisme très complexe, cherchant une amélioration constante de l’image perçue par nos yeux. L’une des tâches les plus banales et automatiques qu’il effectue en permanence est la reconstruction d’une seule image, à partir des deux versions de celle-ci envoyées par chaque Å“il. Cette reconstitution est appelée disparité binoculaire. Ainsi, dans V1, le cerveau reconstitue en relief la partie de l’image vue par les deux yeux, ce qui représente environ 120° du champ visuel. En effet, chaque Å“il possède son propre point de vue puisque les deux pupilles sont en moyenne écartées de 65 à 75mm. D’ailleurs, des neurones sont spécifiquement réservés à cette tâche dans l’aire visuelle primaire : on trouve tout d’abord les cellules simples, sensibles aux contrastes allongés comme les contours des objets, puis les cellules complexes, qui sont quant à elles plus sensibles au mouvement.

(Les images suivantes, qui expriment le phénomène de disparité binoculaire, sont issues du TDC n° 1066.)

     Le cerveau est donc capable de reconstruire une image en 3D à partir des deux images transmises par chaque Å“il. Mais il est également capable de traiter la perspective pour nous faire percevoir une image la plus proche possible de la réalité. Ainsi, lorsqu’un objet en trois dimensions est représenté en deux dimensions, le cerveau augmente les contrastes. Si l’on regarde ces deux boîtes par exemple, on pourrait penser que les lignes bleues et roses ne font pas la même taille, pourtant c’est le cas. En effet, le cerveau sait que sur une photo par exemple, la profondeur est raccourcie par rapport à la réalité. Pour contrer cet effet, il a tendance à rallonger les lignes qui vont dans le sens de la profondeur.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cette image est issue du Sciences & Vie Junior 252Bis.

 

Les images ne sont donc jamais perçues fidèlement par le cerveau, ce qui peut donner lieu à des illusions surprenantes. C’est le cas dans cet échiquier présenté par l’américain Edward Adelson, professeur de sciences de la vision élu dans l’académie nationale de sciences française et américaine, en 1995. On pourrait penser que les cases A et B sont de couleurs différentes, mais elles sont en réalité identiques. En effet, le cerveau a tout d’abord augmenté les contrastes pour nous permettre de mieux distinguer les cases blanches des noires. Puis, en se basant sur son expérience à la vue du cylindre, a obscurcit l’ombre de celui-ci.

     Lorsqu’un objet en trois dimensions est représenté en deux dimensions, il devient un stimulus ambigu. Un stimulus est un message qui arrive au cerveau et y déclenche une réaction particulière. Lorsqu’un stimulus ambigu arrive au cortex cérébral, il y génère donc une alternance de perception. C’est ce que l’on appelle perception bistable : ce phénomène inconscient n’entraîne pas un compromis entre les diverses interprétations possibles d’une image, mais bien une alternance de perception. Cette alternance peut varier d’une personne à l’autre. Ainsi, les illusions donnant à voir plusieurs motifs différents selon l’attention des cellules nerveuses de la rétine rejoignent ce phénomène. C’est le cas du vase de Rubin par exemple. L’un des exemples les plus connus de perception bistable est celui le cube de Necker, représenté ci-contre. On remarque tout d’abord que notre cerveau nous le présente comme un objet en trois dimensions et reconstruit le relief, bien que l’image soit en deux dimensions. Ensuite, il y a deux interprétations possibles de cette image : la face supérieure du cube peut être celle du haut ou du bas. Notre cerveau ne choisit donc pas un compromis entre ces deux interprétations, mais elles s'alternent bien devant nos yeux. La vision, comme le démontrent les illusions d’optique, est une question d’interprétation personnelle. Chez certaines personnes, c’est la face du haut qui dominera comme face supérieure, et chez se sera celle du bas.

Cette image est issue du Sciences & Vie Junior 252Bis
Vase de Rubin
Cube de Necker

     Les illusions perceptives correspondent à des écarts entre les stimulations physiques et les perceptions engendrées par celles-ci. Tout comme les illusions d'optique, elles permettent de comprendre l'« inconscient Â» perceptif, introduit pour la première fois par Leibniz, philosophe allemand du XVII° siècle. Ce terme désigne tous les traitements réalisés automatiquement par les neurones, et dont on ne se rend pas compte. Toutes les étapes d’analyse de l’image et de reconstruction du relief cités précédemment en font donc partie. Une illusion d'optique permet de mettre en évidence l'entrée en jeu automatique des neurones, puisqu’elle crée des réactions inattendues. Prenons l'exemple des illusions dites distordantes. Assez communes, elles sont entièrement constituées de figures géométriques, et pourtant notre cerveau effectue un traitement encore mal expliqué qui modifie notre perception. En effet, sur cette illusion de Kitaoka, les bandes bleues, contrairement à ce que l’on pourrait penser, sont parallèles. Pour créer cette illusion, il s’est notamment inspiré de l’illusion du mur du café Wall, décrite par le psychologue Richard Gregory. Dans cette dernière, on constate que les lignes paraissent elles aussi ne pas être parallèles, ce qui est dû au léger décalage des carreaux noirs.

Illusion du mur du Café Wall

     Un autre exemple de ces illusions est celle de Muller-Lyer réalisée au cours du XIX° siècle. Il nous présente alors des flèches, dont les lignes horizontales ont la même longueur. Pourtant, l’une nous parait plus longue que l’autre à cause de l’orientation des extrémités des flèches. Comme dit précédemment, ces illusions, aussi appelées optico-géométrique, sont difficiles à expliquées. Pourtant, les explications proposées ces dernières années s’accordent à dire que ces illusions tirent leur origine dans le système visuel, là où sont reconstituées les images provenant de chaque Å“il. En effet, lorsqu’un Å“il perçoit les segments des flèches et l’autre leurs extrémités, l’illusion reste la même. La cause n’est donc pas physiologique et n’implique pas la rétine.

Illusion de Muller-Lyer
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