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La rétine :

structure complexe aux illusions

     La rétine est une membrane mince située au fond de l’œil, et qui a le rôle d’un écran sur lequel se fixent les images. C’est à ce niveau que les rayons lumineux entrants dans l’œil sont transformés en messages électriques, qui sont acheminés au cerveau par le nerf optique. Elle se compose de plusieurs types de cellules, qui ont chacune un rôle différent dans la vision. Tout d’abord, la partie la plus externe comporte des cellules qui empêchent les rayons lumineux de se réfléchir dans l’œil. Les cellules dites photoréceptrices sont situées dans sa couche profonde. Ce sont des cellules sensibles à la couleur et à l’intensité lumineuse. Ensuite, les cellules bipolaires et ganglionnaires permettent d’acheminer les messages bioélectriques provenant des photorécepteurs vers le nerf optique, qui les transmet par la suite au cerveau.

 

     De plus, on distingue deux types de photorécepteurs : les cônes et les bâtonnets. Les premiers sont responsables de la vision des couleurs. Il en existe trois sortes, qui possèdent l’opsine bleue (gène S sur le chromosome n° 7), verte (gène M sur le chromosome X) ou rouge (gène L sur le chromosome X). Ainsi, ils permettent une vision diurne en couleur, et une vision des nuances de couleurs par synthèse additive. En effet, chacune des trois opsines absorbe une partie du spectre visible, comme représenté sur le graphique suivant. La synthèse additive permet ensuite, sur le modèle du schéma ci-contre, de reconstituer toutes les couleurs à partir du rouge, du bleu et du vert par addition. Les bâtonnets possèdent quant à eux un seul type de pigment : la rhodopsine. Cela nous permet une vision nocturne en noir et blanc.

 

Les écrans des téléphones, des ordinateurs, des téléviseurs, ... utilisent eux aussi le principe de la synthèse additive et de trichromie. Chaque pixel est en effet composé de trois sous-pixels rouges, bleu et vert. On retrouve alors comme ci-contre les trois couleurs des photorécepteurs de la rétine.

Le saviez-vous ?

Des artistes comme Chuck Close reprendrons ensuite ce principe dans leurs oeuvres. Voici l'une d'entre elles, "James", réalisée en 2004. D'une taille très importante, l'image ne s'assemble que lorsque l'on s'en éloigne.

A chacune des opsines M S et L est associée une molécule de rétinal. Elle est alors sous la forme Z, et se change pour prendre la forme E lorsqu'elle rencontre un photon. Cette modification de la géométrie de la molécule crée l'envoie d'un message nerveux aux autres cellules de la rétine. Une enzyme se charge ensuite de lui faire reprendre sa forme initiale. Ce processus qui ne dure que quelques picosecondes, permet donc la génération du message nerveux qui sera acheminé jusqu'au cerveau dès la réception d'un rayon lumieux par les photorécepteurs de la rétine.

 

     L’œil a, comme dit dans la partie précédente, besoin de lumière pour voir. Chez les humains, l’œil a besoin d’une quantité plus importante de lumière que les chats par exemple, qui possèdent au fond de leurs yeux des cellules qui réfléchissent la lumière et donc voient mieux la nuit. De plus, c’est au niveau de la fovéa, située au centre de l’œil, que la concentration de cônes est la plus élevée : environ 180 000 cônes/mm². A cet endroit, il n’y a aucun bâtonnet. L’homme a donc une meilleure vision à ce niveau. Dans le reste de la fovéa, il y a en revanche beaucoup plus de bâtonnets : environ 80 000 bâtonnets/mm² contre 3 à 4 000 cônes/mm². On dit que son acuité visuelle est maximale. En revanche, au niveau de la tâche aveugle, située au niveau de la convergence de tous les axones des neurones ganglionnaire du nerf optique, il n’y a aucun photorécepteur. La vision n’est donc pas possible à cet endroit, mais chaque Å“il compense la tâche aveugle de l’autre.

 

reconnu dans le monde entier. On cherche alors à donner l’illusion du mouvement, contrairement aux cahiers cinétiques qui le créent à partir de 1820. Dans ces derniers, les cellules de la rétine, qui gardent en mémoire les images pendant 1/10ème de seconde, ne pouvaient distinguer deux images successives lorsqu’elles défilaient à un rythme élevé (environ 24 images par seconde). Ainsi l’on pouvait créer une animation, dont le principe sera repris plus tard pour les dessins-animés par exemple. Victor Vasarely, artiste hongrois puis français né en 1906 et mort en 1997, est considéré comme l’un des chefs de file de l’Op Art. En 1955, il publiera un Manifeste Jaune, dans lequel il définit la « plastique cinétique Â» : selon lui, le mouvement est créé par le regard qui se déplace sur une Å“uvre. Durant sa période blanche et noire, allant de 1953 à 1965, il jouera particulièrement avec les contrastes du noir et du blanc, caractéristiques des premières Å“uvres de l’Op Art. Cela permet l’entrée en jeu du phénomène de persistance rétinienne. Il s’agit de la capacité de l’œil évoqués précedemment qui consiste à superposer les images qu’il voit à celles qu’il vient juste de voir. Cela crée parfois l’illusion du mouvement, mais aussi de l'espace, comme c'est le cas dans cette toile de 1959, Biadan.

     L’Op Art, ou Art Optique, est un mouvement apparu à la fin du XX° siècle. Il inclut toutes les Å“uvres jouant sur des effets visuels pour créer des illusions. C’est en 1951 que les premières Å“uvres apparaissent, et le terme ne sera utilisé qu’à partir de 1964. Grâce à l’exposition « Responsive Eye » (L’œil réceptif) de 1965 au MoMA, à New York, l’Op Art a définitivement été

 

     Akiyoshi Kitaoka est l’un des nombreux chercheurs actuels à s’intéresser aux illusions d’optique pour comprendre les mécanismes de la vision. Professeur de psychologie au Japon, il a notamment créé l’œuvre Rollers suivante, qui donne l’illusion de voir tourner trois cylindres dans des sens opposés. Ces cylindres sont faits de petits ovales bleus aux contours mi noirs mi blancs, le tout sur un fond vert clair. Le mouvement est dû, d’après lui, aux mouvements des yeux qui se déplacent sur l’œuvre : le regard se porte toujours de la zone la plus sombre (noire) à la moins sombre (bleue), et de la plus lumineuse (blanc) à la moins lumineuse (vert). On rejoint ici l’opinion de Vasarely. De plus, on remarque que si l’on fixe son regard, les cylindres s’arrêtent de tourner. La sensibilité des cellules nerveuses de la rétine pourrait alors avoir une influence : il y a un décalage entre leur temps de réaction concernant les éléments de fort contraste (le noir et le blanc), et les autres (le vert et le bleu). Il réutilisera plusieurs fois ce type de procédé, comme par exemple dans ses célèbres Rotating snakes (oeuvre de droite), où l’on voit une multitude de serpents qui s’enroulent à l’infini.

 

     De plus, d’autres illusions peuvent être créées pour donner à voir plusieurs motifs différents. Elles jouent elles aussi sur l’attention des cellules nerveuses de la rétine. Prenons par exemple cette autre Å“uvre d’Akiyoshi Kitaoka, qui laisse à voir, selon si l’œil porte son attention sur le fond blanc ou le fond noir, un chat ou une souris. Plusieurs autres Å“uvres sont similaires, telles que le mythique vase de Rubin, qui peut laisser apparaître un vase ou bien deux visages face à face. Plusieurs artistes s’étaient déjà approprié ce principe dès le XVI° siècle. C’est le cas du peintre italien Giuseppe Arcimboldo, devenu célèbre grâce à ses compositions. A l’aide de fruits, de légumes et de plantes, il fait apparaître des portraits quelconques ou célèbres. Par exemple, il a vers 1950 réalisé un portrait de l’empereur romain Rodolphe II, Vertumne, que l’on peut voir ci-contre.

 

     Un détournement publicitaire a également eu lieu ces dernières années, avec les débuts de l’affichage au XIX° siècle. On retrouve également des illusions d’optique dans celles-ci. Les Rollers et les Rotating Snakes d’Akiyoshi Kitaoka présentés précédemment, sont par exemple apparus dans des publicités des alcooliques anonymes, pour décrire les effets de l’alcool. Le but est ici la prévention, en interpelant et en captant l’attention du spectateur. De plus, les images subliminales sont elles aussi apparues dans la publicité, jouant à leur tour sur le phénomène de persistance rétinienne. Elles consistent à superposer dans une animation une image qui, étant passée à trop grande vitesse, ne sera pas vue par l’œil mais enregistrée par le cerveau. La persistance rétinienne permet de garder en mémoire l’image, c’est pourquoi elle peut avoir des impacts sur notre subconscient. Mais c’est une pratique aujourd’hui très contrôlée après de nombreux scandales. En effet, elle n’a pas toujours été utilisée à de bonnes fins. Nous étudierons cela plus en détail dans la rubrique "La mémoire".

     Nous avons donc pu voir dans cette partie que les artistes ont toujours été des précurseurs, mettant en Å“uvre des procédés qui ont plus tard ouvert la voie, pour mieux connaître les mécanismes de la vision. L’œil est complexe, et son cristallin se comporte comme une lentille convergente pour recevoir la lumière dont il a besoin pour voir. Les images se fixent alors sur la rétine, composée de photorécepteurs. Les artistes ont su développer de nombreuses techniques pour créer des illusions qui jouent avec ces structures. Le cerveau joue également un jeu important, puisqu’il analyse et réinterprète toutes les images qui lui arrivent depuis le nerf optique.

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